Le dernier roi d'Ecosse :
Un tour de force supplémentaire pour Forest Whitaker...
J'y suis allée d'un pas plutôt léger, égayée par mes vacances, satisfaite d'avoir écrit un peu dans mon café, de voir que certains cinémas accueillent à la fois les cartes UGC, et Gaumont, me permettant d'aller au cinéma accompagnée de mon chéri, pleine de l'insouciance des vacances, de l'odeur de printemps humide, bref, des joies de prof au repos...
Mais la faille était là, béante. La réalité s'impose, elle est tellement forte qu'on reste étrangement collé à son siège. Et en même temps, j'ai rarement vu autant de gens partir aux toilettes pendant le film. Parce qu'elle est tellement insupportable cette réalité, qu'il faut être receptif à mille pour cent, impossible de se laisser distraire. Le film n'est plus plaisir, il est violence, il est information, même romancée. Le personnage principal du docteur Carrigan l'écossais, n'a probablement pas existé, mais peu importe. Il est le témoin, comme nous à ses côtés. Nous sommes piégés et prisonniers autant que lui par le système qui se met en place, celui de la dictature, des meutres et des famines. Le mécanisme est clairement décrit, presque froidement, du basculement dans la démesure de chacun, dans une folie dont on ne peut plus s'enfuir.
Forest Whitaker méritait au moins un oscar. Il fascine, il nous absorbe, il nous donne envie de vomir mais pas un instant il ne laisse indifférent. Il joue juste à chaque instant, prouvant qu'il n'y a pas d'issue sans combat, sans une lutte acharnée, construite politiquement, que le sacrifice des vies est bien dérisoire. On en attendait pas moins de lui quand on repense à ses prestations précédentes, notamment dans Ghost Dog ou Smoke.
C'est un film fort qui joue sur nos pré-supposés. Notre image de l'Afrique en souffrance depuis des décennies est ici à peine évoquée. Ce n'est pas utile d'en rajouter. Par contre, la compromission des chefs d'états africains en place prêts à tout pour maintenir leurs pouvoirs, leurs petites prérogatives, quitte à assassiner des centaines de milliers de gens est le coeur de ce film. Chacun jouant son rôle, comme on place des pions sur l'échiquier, rien n'est tû, ni les trahisons, ni les responsabilités de chacun, notamment celles des pays occidentaux qui soutiennent le pouvoir en place tant que cela leur profite.
Un des rares films qu'il ne faut manquer pour rien au monde mais que l'on est pas sûr de pouvoir regarder à nouveau un jour.